A Genève, le racisme divise le monde

A Genève, le racisme divise le monde

Genève aurait sans doute aimé s'épargner une telle confusion pour l'organisation de la conférence de l'ONU sur le racisme. Défections en cascade, polémique autour du président iranien Mahmoud Ahmadinejad et, au final, une conférence vouée à l'échec qui n'effacera en rien le fiasco de la première réunion de Durban en 2000... La presse se fait évidemment un large écho ce matin de cette réunion sous haute tension. Mais il y a d'autres faits intéressants à ne pas occulter. Savez-vous par exemple que la Suisse est la reine des start-up et que l'industrie du livre ne connaît pas la crise?

Conférence sous haute tension «Racisme : la conférence sent vraiment le souffre»: ce titre évocateur de la Tribune de Genève fait évidemment référence à la présence à Genève du président iranien Mahmoud Ahmadinejad. Un président qui a donc été reçu hier soir par les autorités genevoises et par Hans-Rudolf Merz. La Suisse en fait trop, et Merz aurait pu s'abstenir de manger avec son homologue iranien, selon Le Matin . «Selon le protocole, le dîner n'est pas nécessaire », explique l'ancien diplomate Raymond Loretan. D'autant plus que les déclarations anti-israéliennes du président iranien, à son départ de Téhéran, pourrait bien avoir torpillé la conférence. Lors de son discours, il a taxé Israël de "porte-drapeau du racisme". En quelques secondes, l'accord sur la déclaration finale arraché de haute lutte entre les Occidentaux et l'Organisation de la conférence islamique, pour évacuer la question israélo-palestinienne, a volé en éclats, relève la Tribune de Genève et 24 Heures. Comment l'ONU va-t-elle pouvoir se sortir de ce piège? Le machin tant décrié par le général de Gaulle accouche d'un truc qui fait pâlir d'inquiétude toute la communauté internationale, écrivent les quotidiens lémaniques. En eau de boudin, voilà à quoi risque de tourner le grand raout onusien, estime de son côté La Liberté . Pas étonnant que le front des absents, écrit-elle, soit emmené par les Etats-Unis, craignant comme l'Union européenne d'être piégés dans une surenchère verbale à Genève. C'est là pourtant qu'une telle conférence sur le racisme aurait toute sa valeur: proposer des solutions. Seulement, observe encore La Liberté, l'ampleur de la récupération politique dans ce genre de cénacle est telle qu'elle enlève toute crédibilité à ses recommandations, même négociées à la virgule près.

Policiers sur les dents La présence de Mahmoud Ahmadinejad est entourée des mesures de sécurité les plus sévères. Le Blick publie une photo d'un policier à la dégaine de GI, armé d'une énorme pétoire. Et le Tages-Anzeiger s'intéresse à ces hommes engagés dans des unités spéciales des cantons ou de la Confédération. "On se croirait dans un jardin zoologique, constate le quotidien zurichois. Il y a les lynx, la section d'élite de la Suisse centrale. Scorpion en ville de Zurich ou Tigris sous la Coupole fédérale. Mais au fait, combien sont-ils, ces combattants du terrorisme? Dans les cantons, entre 640 et 800, dont 200 en Suisse romande, à quoi il faut ajouter les fédéraux - près de 200 -, sans compter les militaires. On arrive au millier, calcule le Tagi. Un ancien commandant de la police zurichoise propose d'ailleurs de réduire ce nombre pour améliorer aussi la coordination entre les différentes unités. Un coup d'oeil chez nos voisins: le Land allemand du Bade-Würtenberg, davantage peuplé que la Suisse, se contente de 91 policiers spéciaux. Et l'Autriche, deux fois plus d'habitants que l'Helvétie, se contente d'un nombre de 480 superflics.

Des dessins contre le racisme Toujours à propos de cette conférence, plusieurs dessins de presse sont à signaler ce matin. Le Temps en publie quasiment une pleine page. Ils sont signés de plusieurs dessinateurs de renom. Retenons le dessin de Plantu, notre Daumier moderne, qui fait les délices du Monde et de L'Express. Plantu a dessiné l'hémicycle onusien. Tout en haut se trouve Ban Ki-moon. Un barbu préside la séance. Derrière lui une femme en burka apporte une pleine brassée de dossiers consacrés aux droits de la femme. "Merci cocotte, tu poses ça et tu dégages", dit-il. Et d'ajouter: "Par Allah, je déclare donc la session ouverte". On apprend d'ailleurs dans le même journal que les dessinateurs Chapatte et Plantu ont lancé une initiative en compagnie de Marie Heuzé, porte-parole des Nations unies. Chamboulés par l'affaire des caricatures de Mahomet, ils ont créé le réseau "Cartooning for peace", qui réunit des dessinateurs du monde entier, et qui avait organisé en 2006 un colloque à New York intitulé: "Désapprendre l'intolérance". Depuis, une exposition de leurs oeuvres tourne à travers le monde.

Le livre ne connaît pas la crise Du moins si l'on en croit Pierre-Marcel Favre... Selon le patron du Salon international du livre et de la presse qui s'ouvre après demain à Genève, interrogé dans La Liberté et Le Nouvelliste, les éditeurs seront une fois de plus au rendez-vous. Est-ce pour eux une façon d'affronter la crise? Pas du tout, répond Pierre-Marcel Favre. Pour la bonne raison que le secteur de l'édition n'est pas touché par la crise. La situation du livre n'est pas comparable à celle de la presse qui souffre de sa dépendance à la publicité. On pourrait même parler d'un comportement anticyclique, estime-t-il. Et d'expliquer que lorsque l'économie flambe, le livre ne se vend pas beaucoup mieux. Mais quand l'économie va mal, on ne constate pas une chute des ventes. Et comment s'explique cette stabilité du marché du livre? Eh bien, estime Pierre-Marcel Favre, parce que la lecture est un loisir moins cher que beaucoup d'autres. S'offrir un livre est à la portée de la plupart des gens. En tout cas, il n'y a pas de désintérêt pour la lecture, comme on le dit parfois.

La Suisse championne du monde des start-up Alors que le mot crise est dans toutes les bouches, le Tages-Anzeiger fait sa une ce matin des lauriers décernés par le magazine américain Red Herring. Chaque année, cette publication distingue les 100 nouvelles entreprises européennes qu'il juge les plus prometteuses. Et le dernier classement propulse la Suisse en tête, se réjouit le quotidien zurichois: quatorze firmes suisses sortent du lot. C'est mieux que ces gros concurrents sur le marché de l'innovation que sont l'Allemagne, la France, la Suède ou Israël, lequel est aussi inscrit dans ce championnat européen. Parmi les entreprises qui ont propulsé la Suisse en tête, le journal en présente quatre en détail: deux zurichoises et deux romandes travaillant dans la santé. A Lausanne, Sensimed développe des lentilles de contact dans lequel un instrument est implanté. Pendant une journée, cette puce minuscule mesure la pression de l'oeil et permet ainsi de diagnostiquer plus tôt certaines maladies. Autre start-up prometteuse pour le magazine américain, la genevoise Epithelix, qui a mis au point des cultures de cellules de poumons à vendre aux firmes pharmaceutiques qui veulent tester de nouveaux médicaments, par exemple contre l'asthme. Avec cette invention genevoise, plus besoin d'animal de laboratoire.

ps, avec Raphaël Aubert et Simon Corthay, RSR