La prison au rapport

La prison au rapport

Le Conseil de l’Europe publie aujourd’hui un rapport* sur la prison de Rémire-Montjoly. Un autre rapport est sorti il y a quelques semaines.
Le tribunal administratif en 2010. Parmi les causes de l’intérêt porté à la prison de Rémire, la plainte de dix détenus. Ils veulent faire condamner l'État pour violation des droits de l’Homme en raison des conditions de détention. L’affaire pourrait être traitée en mars par le tribunal administratif de Cayenne.

Deux rapports. Aujourd’hui, le Conseil de l’Europe (via le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants) publie son rapport sur une visite menée du 25 novembre au 1er décembre 2008 à Rémire. Le contrôleur général des lieux de privation de liberté, qui s’y est rendu entre le 27 octobre et le 1er novembre, a rendu le sien il y a quelques jours.

La surpopulation, toujours. Le problème de surpopulation revient, évidemment. Il y avait plus de 650 détenus pour 550 places, lors des visites. À la maison d’arrêt des hommes, ils étaient 369 pour 168 places. Les rapports relèvent aussi le manque de produits d’hygiène distribués aux détenus, les problèmes des hirondelles, le manque d’activité et l’ennui général.

Problèmes quotidiens. Les codétenus servent parfois d’interprètes. Les psychotropes du week-end sont distribués dès le vendredi à ceux qui en ont besoin. Le courrier n’est distribué que le vendredi alors qu’il devrait l’être tous les jours. Le courrier en provenance du Brésil qui n’est pas en recommandé est perdu. Les détenus de maison d’arrêt n’ont accès au téléphone que le week-end ; impossible donc d’appeler avocats, administrations ou éventuels employeurs. Les femmes n’ont pas toujours accès à la machine à laver, ni à la bibliothèque, ni au terrain de sport parce qu’il faudrait bloquer les mouvements des hommes.
Pas d’interphone. La situation peut-être la plus hallucinante concerne le quartier de semi-liberté. Il n’y a pas d’interphone. « En cas d’incident, le détenu doit se signaler par la fenêtre en faisant brûler un chiffon qui serait vu par le mirador 2. Aucun extincteur n’est accessible », pointe le contrôleur général. Les problèmes de communication sont généraux à la prison.

Privés de Redoute. Depuis la fermeture de la Redoute, la prison n’arrive plus à faire parvenir des chaussures aux prisonniers. Résultat, ils n’ont plus que des tongues.

Tuberculose. Fin juin, des problèmes de tuberculose sont apparus en nombre, à la prison. Cela ne surprend guère à la lecture des rapports : « La vacation du pneumo-phtisiologue, bihebdomadaire en 2007, n’était plus assurée depuis au moins six mois », note le Conseil de l’Europe. Le contrôleur général confirme : il n’est plus venu depuis avril 2008.

Arrêt de travail. Fin 2008, 194 personnes sont affectées à la surveillance. En 2007, elles ont cumulé 22 arrêts de travail et 2 879 jours d’arrêt de travail, soit 14, 84 jours par agent. Le contrôleur général relève leurs problèmes de santé (fièvre Q, palu), lié aux conditions de travail avec les prisonniers.

Pistolets électriques. Comme nous le révélions en 2007, la prison a été dotée de pistolets à impulsion électrique. Le Conseil de l’Europe émet de « fortes réticences » à ce sujet. Ils n’ont en fait jamais été utilisés.

Va comme je te pousse. « Le quartier des arrivants n’en est pas un de fait, déplore le contrôleur général. Les arrivants ne passent qu’une nuit dans ce lieu (puis sont affectés) là où il y a de la place. »

Violences en baisse. Le Conseil de l’Europe se réjouit de ne pas avoir « recueilli d’allégation, ni d’autres indices, de mauvais traitements physiques récents infligés par le personnel pénitentiaire à l’encontre de personnes détenues ». La difficulté reste les violences entre détenus. Il y a eu 244 incidents de la sorte en 2007, 193 sur les dix premiers mois de 2008. Le rapport estime que « le personnel doit être en nombre suffisant dans les quartiers de détention ». Il s’inquiète pour leur sécurité.

Bonne tenue. Les deux rapports décrivent une prison plutôt en bon état. La description de certaines cellules fait quand même froid dans le dos : « Les contrôleurs ont visité une cellule occupée par quatre personnes. L’air ne circule pas et la chaleur est suffocante. L’aspect général est celui du délabrement. Les détenus sont en short et torse nu. Ils ruissellent de transpiration. L’un d’eux affirme être là depuis quinze mois et devoir sortir en avril 2010. Il a demandé à pouvoir, sans succès, se rendre à l’école depuis quatre mois. Il n’a jamais reçu de mandat et déplore l’absence de travail en atelier. Certains attendent quatre à cinq mois pour bénéficier d’une heure de sport par semaine. Ils se plaignent d’une nourriture toujours identique. Des cafards et des souris circulent dans la cellule. Le manque de papier hygiénique est signalé. Le battant de l’espace réservé aux toilettes est inexistant. »